Vers 1904, Pierre Bonnard découvre aussi le Midi, de passage à Saint-Tropez, où séjournent ses amis Édouard Vuillard et Ker-Xavier Roussel. Il rend visite à Valtat et Signac, lequel reçoit la même année celle de Matisse et Derain en route vers le fauvisme. Invité par Manguin, Bonnard reviendra à Saint-Tropez durant un plus long séjour à l'été 1909 qui lui permettra de peindre quelques toiles. Il ne cessera d'alterner des voyages entre Paris, la Normandie et le Midi jusqu'en 1914.
Dans le Midi, Bonnard découvre une lumière et une végétation qu'il ne connaît pas. La couleur des eucalyptus, oliviers, amandiers et mimosas se révèle sous la lumière de la Méditerranée. L'impact sur le peintre est immédiat, il écrira à sa mère une phrase désormais célèbre : « J'ai eu un coup des Mille et Une Nuits. La mer, les murs jaunes, les reflets aussi colorés que les lumières ... ».
En 1922, Bonnard découvre Le Cannet. Définitivement conquis par cet havre de paix qui répond d'une part aux exigences de santé de son épouse Marthe, et d'autre part à sa recherche de tranquillité, de nature et de hauteur, Bonnard vient y passer chaque hiver dans diverses maisons qu'il loue : «Maison Blanche », «L'Hirondelle », «Le Rêve ». En 1926, il achète à un jardinier une maison aux allures modestes, avenue Victoria, qu'il baptiste «Le Bosquet ». Bonnard fait partie des peintres les plus côtés et ses moyens auraient pu lui permettre d'acquérir une maison bien plus grande et confortable, avec un accès plus facile. Mais c'est l'aspect tranquille du site qui va le séduire et la vue dominante sur la baie de Cannes et le massif de l'Estérel. Il en fait modifier les ouvertures pour que depuis l'intérieur la nature soit visible de partout.
Il s'y installe en 1927, après y avoir fait quelques arrangements. Le seul luxe de la maison est la baignoire, qu'il fait placer sur l'insistance de sa femme Marthe. Pierre Bonnard ne se fixe pas d'abord définitivement au Bosquet ; son âme de voyageur l'amène à faire sans cesse des va-et-vient entre Paris, Vernonnet et Le Cannet. La proximité de son ami Matisse qui séjourne à Nice et la présence de Lebasque au Cannet lui permettent d'avoir des relations sociales et artistiques continues. Durant toutes ces années, sa présence au Cannet sera des plus discrètes. Il se mêle peu à la vie du village, mais accepte toutefois en 1935 de participer au 1er salon des artistes du Cannet avec Henri Lebasque. Il réalisera, pour l'occasion, un tableau représentant un paysage.
A la déclaration de la deuxième guerre mondiale, Pierre Bonnard se retire définitivement au Bosquet. Il y vit en solitaire, diverti seulement par un cercle d'initiés dans le milieu de l'art et de la peinture, qui vient lui rendre visite. C'est dans ce «charmant pigeonnier» selon les mots de son ami Matisse, que le 23 janvier 1947 Bonnard s'éteint. Il sera inhumé au cimetière Notre-Dame des Anges auprès de sa femme, disparue en 1942.
A la mort de Pierre Bonnard, sa succession donne lieu à un procès, qui durera plus de 20 ans. Laissée à l'abandon pendant toutes ces années, la maison deviendra en 1968, après adjudication, la propriété de Charles Terrasse, neveu du peintre. Depuis 1975, la maison de Pierre Bonnard est inscrite à l'Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques. Puis en 2007, la maison et son jardin sont classés.
La présence du peintre, dans la maison aux murs roses, est encore gardée intacte aujourd'hui grâce à Dominique Terrasse.